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Newsletter du cabinet Cazeau & Associés – Janvier – Février 2024

Newsletter

Par Philippe Legrez, ancien directeur juridique Michelin

En ce début d’année 2024, le  cabinet vous présente tous ses vœux, et vous souhaite une très belle et heureuse année 2024.

Grâce à vous, nous avons passé une année 2023, passionnante, très riche sur les plans humains, et professionnels.

Nous avons géré à vos côtés des dossiers captivants dans des domaines très variés, et dans lesquels nous avons fourni un vrai travail d’équipe avec nos clients.

Alors merci pour cela, merci pour votre confiance à tous, et vive 2024, pour que l’aventure continue !

Nous vous proposons en ce début d’année un nouveau sujet (pas nouveau du tout en réalité !) qui porte sur la question, essentielle selon nous, de savoir ce que les directions juridiques attendent de leurs avocats.

Bien sûr, avec les années qui passent et  le contexte juridique, économique et technologique sans cesse en évolution, on pourrait penser que la réponse à ces questions est par essence évolutive.

En réalité, les fondamentaux sont toujours les mêmes, et nous avons demandé à l’ancien directeur juridique du groupe Michelin de nous dire ce qu’il en pensait.

Qu’il soit ici remercié d’avoir bien voulu  nous donner son point de vue très précieux.

Et bien sûr, vos commentaires seront toujours les bienvenus

Bonne lecture à tous

Ce qu’attendent les directions juridiques de leurs avocats

Comme tout prestataire de services, l’avocat rend un service qui vise à satisfaire au mieux les besoins de son client. Mais l’avocat connait-il exactement les attentes de son client ? L’interroge-t-il au début de ses missions sur ce qui est attendu de lui ? Au terme de ses missions lui soumet-il un questionnaire de satisfaction verbal ou écrit pour savoir comment sa prestation a été perçue par son client ? Certains cabinets le font, d’autres y renoncent faute de temps, ou par conviction que le client continue de les apprécier puisqu’ il continue de recourir à eux, ou encore par orgueil ne voulant pas se soumettre au jugement de leur client.

La connaissance fine et régulière des attentes du client et de ses évaluations ex ante et ex post offre pourtant à l’avocat des opportunités d’amélioration de ses prestations. En adhérant pleinement aux attentes de son client, l’avocat a toutes les chances de pérenniser la relation avec le client.  Faute de savoir ce que son client pense réellement de son travail, l’avocat ne dispose d’aucun capteur, d’aucun signe avant-coureur de l’éventuelle dégradation de sa relation avec son client,  et dans la pire des hypothèses, découvrira avec stupeur que le client l’a quitté sans avoir eu la possibilité de redresser la barre quand il était encore temps.

Si les entreprises attendent de leur avocat qu’ils sachent connaitre et prendre en compte dans sa pratique leurs spécificités propres ,  l’expérience tend à montrer que les entreprises – quelque soit leur taille et leurs problématiques juridiques – ont en commun un certain nombre d’attentes élémentaires envers leur avocat. On peut tenter de les résumer comme suit (sans prétendre à une parfaite universalité de celles-ci pour toutes les entreprises ni à l’exhaustivité) :

 

(i) La connaissance de l’entreprise par l’avocat 

Un avocat qui cherche à connaitre son entreprise-cliente (sa stratégie, ses activités, son organisation, son personnel etc.) non seulement sera généralement mieux à même de traiter les dossiers de sa cliente mais sera vraisemblablement mieux apprécié de celle-ci. Il est toujours surprenant pour une direction juridique d’entreprise de découvrir que certains avocats ne s’intéressent aucunement à l’activité de son entreprise-cliente voire à l’activité de la direction juridique.

(ii) L’avocat “businessminded ” et “solutionoriented

L’entreprise attend de son avocat qu’il comprenne et défende ses enjeux business, en d’autres termes, qu’il trouve des solutions à ses problématiques juridiques, favorables aux activités économiques de l’entreprise. Tout en comprenant et acceptant les contraintes juridiques, l’entreprise se méfie des avocats qui lui disent qu’elle ne peut pas faire ce qu’elle souhaite faire. L’entreprise veut idéalement qu’on lui trouve des solutions aux interdits ou contraintes juridiques qui s’imposent à elle et qu’elle doit respecter.

(iii) La compétence technique

Les directions juridiques d’entreprise recourent en principe aux avocats soit par manque de compétence dans certains domaines du droit, soit par insuffisance de personnel juridique interne.

La complexité croissante du droit et la multiplication des spécialités juridiques contraignent les entreprises à faire appel à des avocats spécialistes.

La direction juridique veut donc, dans certains cas, pouvoir s’appuyer sur des avocats compétents dans leur spécialités. Le risque pour elle est l’avocat qui pour « avoir le dossier » se prétend compétent dans un domaine dans lequel il ne l’est pas réellement.

Elle attend de son avocat soit qu’il soit réellement compétent pour le dossier qui lui est présenté, soit s’il ne l’est pas qu’il le dise en toute transparence et loyauté envers son client , soit enfin qu’il puisse lui recommander un confrère ou une consœur compétent dans la matière concernée.

(iv) La réactivité

Le temps des affaires s’est accéléré pour de multiples raisons. Les directions juridiques peuvent être sous la pression de leur management qui exige que leurs travaux soient parfois réalisés dans des délais courts. Lesdites directions juridiques reportent immanquablement cette pression de temps sur leurs avocats. La capacité des avocats à tenir les délais qui leur sont imposés est un facteur-clé de la qualité de leur prestation.

(v) Le juste prix et prévisibilité des honoraires

Toute prestation juridique mérite rémunération. La difficulté pour les directions juridiques est de payer le juste prix et d’avoir une bonne prévisibilité des honoraires qui pourront être facturés par leur avocat.

Sans entrer dans les différentes modalités de facturation des avocats (essentiellement au forfait, au temps passé et/ou au résultat), les directions juridiques veulent en général ne pas  dépasser leur budget (lorsqu’elle en ont un) ou en tout cas ne pas dépasser ce qu’elles considèrent être approximativement le prix de marché (ce prix de marché étant variable selon la taille des cabinets d’avocats, leur expérience, leur réputation…), les plus avisées des directions juridiques  étant conscientes que sous-payer un avocat n’est pas la meilleure façon d’avoir un service de qualité.

La prévisibilité des honoraires facturés, surtout dans les dossiers « au long cours », est importante pour elles : elles redoutent de découvrir en fin de dossier un montant d’honoraires facturés supérieur à leurs attentes qui fasse « exploser leur budget ». D’où l’importance de fixer au départ un mécanisme d’honoraires avec des plafonds et d’être tenus régulièrement informé de l’importance du travail fourni par l’avocat dans le dossier concerné.

(vi) Partage

Les directions juridiques sont souvent moins staffées et moins équipées en outils numériques, legaltechs, bases de données et autres, que les cabinets d’avocats. Elles sont donc souvent demanderesses de partage de ces outils mais aussi de formation dans des domaines où elles manquent de technicité juridique. C’est une attente croissante des directions juridiques envers leurs cabinets d’avocats.

Avocats et juristes d’entreprise travaillent en couple dans l’intérêt de l’entreprise qu’ils servent chacun à leur manière. Comme dans tout couple, la bonne compréhension et satisfaction des besoins et attentes de l’autre est gage de réussite. Pour que ce couple avocat-juriste d’entreprise fonctionne au mieux, il faudra aussi procéder à la revue symétrique des attentes des avocats envers les directions juridiques !