Loi 2012-958 du 16 août 2012 (publication au JO du 17 août)
Annonces du Gouvernement du 12 septembre 2012
– Sur le plan fiscal, on retiendra notamment, s’agissant de la fiscalité des particuliers, la contribution exceptionnelle sur la fortune mise à la charge des redevables de l’ISF et le durcissement des droits de mutation à titre gratuit et, s’agissant de la fiscalité des entreprises, la restriction sensible des possibilités de déduction des aides interentreprises, l’instauration d’une contribution additionnelle à l’impôt sur les sociétés sur les distributions de bénéfices et l’abandon du relèvement au 1er octobre prochain du taux normal de TVA.
– Sur le plan social, la loi durcit le régime social des indemnités de rupture et relève le forfait social. La loi revient aussi sur les exonérations fiscales et sociales applicables aux heures supplémentaires.
Nous reviendrons sur chacune de ces mesures adoptées avant d’exposer les projets de reformes fiscales, que le gouvernement a dévoilé ce 12 septembre lors d’une communication relative aux grandes orientations budgétaires et fiscales. Celles-ci devraient permettre de ramener le déficit public à 3% du PIB, ce qui équivaut à un tour de vis de plus de 20 milliards d’euros.
Le Projet de loi de finances pour 2013 sera présenté et adopté en Conseil des Ministres le 28 septembre prochain.
1. Les mesures adoptées dans la loi de finances rectificative pour 2012 du 16 août 2012
Fiscalité des particuliers
Relèvement des droits de mutation à titre gratuit
A compter du 17 août, la fiscalité des donations et des successions est alourdie sur plusieurs points :
– l’abattement en ligne directe est abaissé à 100 000 € ;
– le délai de rappel fiscal des donations antérieures est allongé à quinze ans au lieu de dix ans ;
– le délai pour bénéficier à nouveau de l’exonération des dons familiaux en espèces est allongé à quinze ans ;
– le principe d’actualisation des différents abattements, tarifs et seuils est supprimé.
Instauration d’une contribution exceptionnelle sur la fortune au titre de 2012
Une contribution exceptionnelle sur la fortune, calculée selon un tarif progressif identique à celui appliqué pour le calcul de l’ISF 2011, est instituée à la charge des redevables de l’ISF 2012 : seules les personnes dont la valeur nette taxable du patrimoine est égale ou supérieure à 1,3 million d’euros sont assujetties à la contribution mais elles sont taxées pour la part qui excède 800 000 €. Le montant de l’ISF dû ou payé au titre de l’année 2012 (avant réductions d’impôt) est imputable sur la contribution.
Les redevables dont le patrimoine est compris entre 1 300 000 € et 3 000 000 €, qui ont déclaré l’ISF sur leur déclaration des revenus n° 2042 C, mais qui n’ont pas encore payé leur cotisation, recevront en octobre un avis d’imposition indiquant le montant de l’ISF 2012 et celui de la contribution exceptionnelle, qu’ils devront acquitter au plus tard le 15 novembre 2012.
Les redevables dont le patrimoine est égal ou supérieur à 3 000 000 €, qui ont souscrit la déclaration d’ISF n° 2725 et payé l’impôt correspondant le 15 juin 2012, recevront en octobre un formulaire de déclaration spécifique, à souscrire le 15 novembre 2012 au plus tard et à accompagner du paiement de la contribution.
Suppression de l’exonération fiscale des heures supplémentaires et assimilées
L’exonération d’impôt sur le revenu de la rémunération versée au titre des heures supplémentaires et complémentaires est supprimée pour les heures effectuées à compter du 1er août 2012.
Assujettissement des revenus immobiliers des non-résidents aux prélèvements sociaux
Les revenus fonciers et les plus-values immobilières réalisés par des personnes non domiciliées fiscalement en France sont soumis aux prélèvements sociaux, au taux global de 15,5 %.
Cette mesure s’applique aux :
– revenus fonciers perçus à compter du 1er janvier 2012,
– plus-values réalisées au titre des cessions intervenues à compter du 17 août 2012.
Augmentation de la taxe annuelle sur les logements vacants
Le taux de la taxe annuelle sur les logements vacants est porté à 12,5 % la première année d’imposition, 15 % la deuxième année et 20 % à compter de la troisième année, au lieu respectivement de 10 %, 12,5 % et 15 %. Ces dispositions s’appliquent aux logements qui sont dans le champ d’application de la taxe au 1er janvier 2013.
Fiscalité des entreprises
Taxe sur la valeur ajoutée – TVA
Le relèvement du taux normal de la TVA de 19,6 à 21,2 %, qui devait entrer en vigueur le 1er octobre 2012, est supprimé. Il en est de même pour le relèvement des taux particuliers applicables en Corse.
Les spectacles vivants et les opérations portant sur les livres sont soumis au taux réduit de 5,5 % (2,1 % en Corse), au lieu du taux de 7 % (à compter du 1er janvier 2013).
Le maintien du bénéfice du taux réduit de TVA de 5,5 %, au lieu du taux de 7 % applicable depuis le 1er janvier 2012, pour les livraisons à soi-même de travaux d’amélioration, de transformation, d’aménagement ou d’entretien de logements sociaux effectués dans le cadre d’opérations d’acquisition-amélioration (acquisition et rénovation de logements ou d’immeubles destinés au logement locatif social), lorsque ces travaux ont fait l’objet d’une décision d’octroi d’une subvention de l’Etat intervenue avant le 1er janvier 2012.
Institution d’une contribution additionnelle à l’impôt sur les sociétés au titre des montants distribués
Il est institué une contribution additionnelle à l’IS de 3 % sur les montants distribués, à compter du 17 août 2012, par les sociétés ou organismes français ou étrangers passibles de l’IS en France. Sont toutefois exclus du champ d’application de la contribution additionnelle, les organismes de placement collectif visés à l’article L. 214-1 du Code monétaire et financier et les PME au sens de la législation communautaire.
Toutes les distributions sont soumises à cette taxe, y compris les revenus réputés distribués, à l’exception, toutefois, des distributions entre sociétés d’un même groupe fiscal (notion d’intégration fiscale différente de celle du régime mère fille) ou d’un même groupe bancaire mutualiste ou encore d’un même groupe de SIIC, ou les distributions en actions ou en certificats coopératifs d’investissement.
Aménagement de la taxe sur les acquisitions de titres de capital
La taxe sur les acquisitions de titres de capital est, à compter du 1er août 2012, due par le prestataire qui reçoit directement de l’acquéreur final l’ordre d’achat en cas de chaîne d’intermédiation, et perçue au taux de 0,2 % (au lieu du taux de 0,1 % initialement prévu), selon une liste de sociétés émettrices des titres dont l’acquisition entre dans le champ d’application de la taxe.
Autres mesures
Les députés ont adopté en outre les mesures suivantes :
– le versement anticipé d’une partie de la contribution exceptionnelle sur l’impôt sur les sociétés à la date du paiement du dernier acompte d’IS ;
– le durcissement des règles de transfert et de report des déficits en cas de restructuration ou de changement d’activité ;
– la suppression de l’avantage fiscal lié à la provis
ion pour investissement ;
– la limitation de la déductibilité des moins-values sur titres de participation cédés dans les deux ans d’un apport ;
– la suppression de la possibilité de déduire des résultats les aides n’ayant pas de caractère commercial consenties à une autre entreprise ;
– la suppression de la retenue à la source sur les dividendes versés à des organismes de placement collectif étrangers ;
– les mesures visant à contrecarrer les schémas d’optimisation consistant pour une société mère à cumuler l’exonération des dividendes dans le cadre du régime mère-fille et la déduction d’une perte, d’une moins-value ou d’une provision pour dépréciation ;
– l’institution de nouvelles mesures anti-abus contre les schémas de désinvestissement « coquillards » ;
– l’attribution aux sociétés françaises réalisant des bénéfices dans des pays à fiscalité privilégiée hors de l’Union européenne de la charge de prouver l’effet principalement autre que fiscal des opérations de leurs filiales étrangères, que celles-ci soient établies ou non dans des Etats ou territoires non coopératifs en matière d’échange d’informations fiscales ;
– la création d’une contribution exceptionnelle due par certains établissements de crédit ;
– l’instauration d’une contribution exceptionnelle sur les stocks de produits pétroliers.
Charges sociales
Suppression de l’allègement programmé des cotisations patronales d’allocations familiales et de ses incidences sur le calcul de la réduction Fillon
Corrélativement à la remise en cause de la « TVA sociale », le dispositif d’allègement des cotisations patronales d’allocations familiales, qui avait été programmé pour entrer en vigueur à compter du 1er octobre 2012, est abrogé.
Le nouveau barème de calcul des cotisations d’allocations familiales, fixé en fonction du niveau de la rémunération versée au salarié, est en conséquence supprimé et le dispositif antérieur rétabli : la cotisation patronale d’allocations familiales continuera donc à s’appliquer, sans changement, au taux de 5,4 % sur la totalité du salaire versé.
Suppression des allègements de charges sociales sur les heures supplémentaires et recentrage de la déduction forfaitaire sur les TPE
L’exonération sociale applicable aux rémunérations des heures supplémentaires et complémentaires accomplies à compter du 1er septembre 2012 est supprimée. Ainsi, il est mis fin :
– à la réduction des cotisations salariales dont pouvaient bénéficier les salariés au titre de la rémunération des heures supplémentaires et complémentaires effectuées, quel que soit l’effectif de l’entreprise ;
– à la déduction forfaitaire sur les heures supplémentaires dans les entreprises de 20 salariés et plus.
La déduction forfaitaire sur les cotisations patronales est maintenue pour les seules entreprises de moins de 20 salariés. Son montant devrait être fixé, comme actuellement, à 1,5 € par heure supplémentaire. Les modalités d’application de la déduction forfaitaire applicable aux entreprises de moins de 20 salariés seront précisées par décret.
Abaissement du seuil d’assujettissement des parachutes dorés aux charges sociales sur salaires dès le premier euro
Désormais, les indemnités de rupture ou de cessation forcée des mandats sociaux dont le montant est supérieur à 10 fois le plafond annuel de la sécurité sociale (jusqu’alors fixé à 30 fois), soit au montant de 363 720 € en 2012, sont soumises dans leur totalité, dès le premier euro, aux cotisations de sécurité sociale, à la CSG et à la CRDS (sans abattement pour frais professionnels).
Cette mesure s’applique aux indemnités versées à compter du 1er septembre 2012.
Doublement du taux des contributions patronales dues au titre des retraites-chapeaux
Les prélèvements sociaux sur les retraites-chapeaux, à la charge de l’employeur, sont à nouveau alourdis.
Le taux de la contribution patronale spécifique qui s’applique en fonction de l’option, irrévocable, choisie par l’employeur (prélèvement à l’entrée ou à la sortie) est, à compter du 1er janvier 2013, doublé et fixé à :
– 32 % pour la contribution due sur les rentes versées ;
– 24 % lorsque la contribution spécifique est assise sur le montant des primes versées aux organismes gestionnaires du régime de retraite à prestations définies (gestion externe) ;
– 48 % lorsque la contribution spécifique est assise sur la partie de la dotation aux provisions ou sur un montant mentionné en annexe du bilan, correspondant au coût des services rendus au cours de l’exercice (gestion interne).
Nouvel alourdissement de la taxation des stock-options et des attributions gratuites d’actions
La taxation des stock-options et des attributions gratuites d’actions est à nouveau alourdie par deux mesures :
– le relèvement du taux de la contribution patronale, porté de 14 à 30 % et de la contribution à la charge du bénéficiaire, porté de 8 à 10 % ;
– la suppression du taux dérogatoire applicable aux attributions gratuites d’actions dont la valeur annuelle par salarié était inférieure à la moitié du plafond annuel de la sécurité sociale.
L’augmentation du taux de la contribution patronale est applicable aux options consenties et aux attributions d’actions gratuites effectuées à compter du 11 juillet 2012.
Relèvement du taux du forfait social de 8 à 20 %
Le taux du forfait social est relevé de 8 à 20 %.
2. Les réformes annoncées en Conseil des Ministres du 12 septembre 2012
Concernant les particuliers
Réforme de la fiscalité des revenus du capital
Elle aura pour objectif de taxer les revenus mobiliers (intérêts et dividendes) et les plus-values mobilières comme les revenus du travail et de les soumettre par conséquent au barème progressif de l’impôt sur le revenu.
Le ministre n’a fait état d’aucune mesure similaire pour les revenus fonciers et les plus-values immobilières.
Mais le régime des plus-values immobilières sera lui aussi réformé « pour permettre un choc d’offre en 2013 visant à lutter contre la rétention foncière ».
Taxation exceptionnelle à 75%
L’introduction d’une taxation exceptionnelle à 75 % de tous les revenus d’activité supérieurs à 1 M€ par bénéficiaire (et non par foyer fiscal), qui prendra en compte les autres contributions déjà versées, est par ailleurs confirmée.
Cette contribution s’appliquera pendant deux ans, le temps du redressement des comptes publics.
Autres mesures
Il est prévu également :
– une réforme de l’ISF ;
– le gel du barème de l’impôt sur le revenu, assorti d’un mécanisme de décote permettant de maintenir en dehors du champ de l’impôt les contribuables qui deviendraient imposables alors que leurs revenus réels n’ont pas progressé ;
– l’introduction d’une tranche marginale de l’impôt sur le revenu à 45 %, au-delà de 150 000 € par part ;
– la baisse du plafond du quotient familial à 2 000 € ;
– une nouvelle diminution du plafond des avantages procurés par les niches fiscales.
Concernant les entreprises
Les hausses de prélèvements seront principalement ciblées sur les grandes entreprises et les plus grands groupes, dont les avantages fiscaux seront réduits. Toutefois, le ministre n’a pas fourni le détail des mesures envisagées, se content
ant de mentionner le plafonnement des intérêts d’emprunt déductibles.
Les dispositifs dont bénéficient les TPE et PME seront en revanche préservés et un élargissement du crédit d’impôt recherche sera prévu en leur faveur.
Il ne s’agit, à ce stade, que d’orientations budgétaires et fiscales présentées par le Ministre de l’économie et des finances. Le Conseil adoptera, le 28 septembre prochain, le projet de loi de finances pour 2013, laquelle s’inscrira dans le cadre de l’agenda du redressement fixé par le Président de la République, avec pour ambition « d’atteindre l’équilibre des comptes publics en 2017 ».
Eve d’Onorio di Méo
Avocat spécialiste en Droit Fiscal
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