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Newsletter du cabinet Cazeau & Associés – Août 2020

Newsletter
Août 2020

Ce mois-ci le cabinet vous présente un résumé de l’intervention de M. Philippe LEGREZ, Délégué Général de la Fondation Michelin, dans le cadre du webinaire « Le mécénat d’entreprise, un moyen d’enrichir sa RSE » organisé par le cabinet les 16 et 21 juillet dernier.

Voici les liens pour voir ou revoir ce webinaire en deux parties:

Partie 1

Partie 2

 

Propos de M. Philippe LEGREZ :

La Mécénat d’entreprise, un moyen d’enrichir sa RSE.

I/ Mécénat et RSE, points communs et différences

A) Le mécénat, qu’est-ce que c’est ?

On peut définir le mécénat d’entreprise comme l’ensemble des dons faits par l’entreprise à un organisme d’intérêt général. Pour l’administration fiscale, un organisme présente un intérêt général à la condition qu’il n’exerce pas une activité lucrative, qu’il ait une gestion désintéressée et qu’il ne fonctionne pas au profit d’un cercle restreint de personnes.

Les dons résultant d’une action de mécénat peuvent donc revêtir plusieurs formes : don en espèces, don en nature ou mise à disposition de salariés à des organismes d’intérêt général/prestations de service.

B) La RSE expliquée de manière simple

La RSE quant à elle est « la responsabilité sociétale de l’entreprise » en matière de relations sociales, de respect de l’environnement et de prise en compte des enjeux de société. L’idée sous-jacente de la RSE est que l’entreprise ne doit plus être uniquement créatrice de valeur mais qu’elle doit tenir compte de son environnement interne et externe. Ce peut être en conduisant une bonne politique de santé et de sécurité des salariés, en favorisant l’inclusion et la diversité, en s’assurant que ses partenaires respectent les droits humains ou en réduisant son impact écologique.

C) Points communs et différences entre mécénat et RSE

On dit couramment que la RSE vise le « bien commun » et que le mécénat sert « l’intérêt général ». Ces deux approches partagent le même objectif qui est d’exprimer l’engagement sociétal de l’entreprise. Avec la RSE comme avec le mécénat, la société prétend répondre aux attentes de la société, au-delà de ses simples obligations légales. Ajoutons que RSE et mécénat portent conjointement les valeurs de l’entreprise. Ce qui attache les consommateurs à une marque / une entreprise.

Le principal point de divergence résulte dans le fait que la RSE peut permettre à l’entreprise de mieux marketer et vendre ses produits ou ses services dans une perspective lucrative, le mécénat est totalement facultatif pour une entreprise et n’a en principe pas d’impact direct sur ses ventes. Il ne s’inscrit pas dans une perspective lucrative. L’entreprise ne tire pas directement profit de son mécénat alors que ses actions de RSE peuvent être un argument de vente et directement influer sur sa performance économique. Par ailleurs, à la différence de la RSE, le mécénat d’entreprise jouit d’un régime fiscal préférentiel car les dons sont déductibles à 40% du montant de l’impôt sur les sociétés.

 

II. L’articulation organisationnelle et concrète de la RSE et du mécénat

Du point de vue organisationnel, il ne semble pas exister un modèle d’organisation unique prédominant en matière de RSE. Certaines entreprises possèdent un service de RSE spécifique et d’autres non. S’agissant du mécénat, il peut être pratiqué par l’entreprise elle-même « en régie directe » ou à travers une structure dédiée au mécénat le plus souvent une fondation d’entreprise ou un fond de dotation. Dans le premier cas du mécénat en régie directe, les responsables du mécénat varieront selon l’entreprise, sa taille, son mode d’organisation, et pourront être le chef d’entreprise lui-même, les responsables RSE, communication, affaires publiques, voire d’autres. Il va de soi que plus l’entreprise souhaitera pratiquer un mécénat proche de la RSE, plus il sera organisationnellement justifié que le mécénat soit logé au sein du service de RSE ou rattaché hiérarchiquement à celui-ci.

Du point de vue concret, On peut sans doute distinguer deux situations très différentes : la première est celle où l’entreprise souhaite faire un mécénat lié à ses activités et aligné sur sa politique RSE (« mécénat stratégique »). La seconde situation est celle où le chef d’entreprise ou les responsables du mécénat mécènent des actions en fonction de leurs goûts ou de leur historique personnel, sans rapport avec l’activité de l’entreprise.

 

III. Les raisons d’entreprendre des actions de mécénat

A) Une logique lucrative pour compléter sa RSE

Le mécénat peut être utilisé pour accroitre l’engagement sociétal de l’entreprise. Les injonctions sociétales actuelles envers les entreprises ne sont pas seulement « défensivement » qu’elles doivent prévenir ou atténuer les conséquences éventuellement néfastes de leur activité par exemple sur leur personnel, leurs sous-traitants, l’environnement etc. mais « offensivement » qu’elles doivent garantir un développement durable à l’humanité. Les politiques de RSE et un mécénat « dynamiques » sont de nature à augmenter l’attractivité de l’entreprise. Un certain nombre de travaux d’économistes attestent qu’engagement sociétal et création de valeur vont souvent de pair.

B) Une logique non-lucrative altruiste ou moteur d’innovation

Néanmoins, le mécénat ne se borne pas à l’engagement sociétal de l’entreprise, il peut être perçu d’un autre œil. Le mécénat permet d’être un incubateur ou une matrice d’innovation dans des domaines très variés. Comme le mécénat ne vise pas de retour sur investissement et qu’il s’inscrit dans une logique de non-lucrativité, il peut tester des concepts nouveaux que le monde lucratif ou marchand n’aurait pas nécessairement réalisé faute de rentabilité prévisible.

Le mécénat permet aussi à l’entreprise de sortir de son monde propre et de « jeter des ponts » avec des personnes et des milieux qu’elle ne côtoie pas nécessairement dans le cadre de son activité.

L’entreprise peut aussi faire réaliser gratuitement des prestations de services par ses salariés pour le compte d’organismes d’intérêt général ou mettre gratuitement ses salariés à la disposition d’organismes d’intérêt général pour leur faire bénéficier des compétences de ses salariés (« mécénat de compétence »). Par ce biais, l’entreprise fait profiter de manière altruiste à la communauté des compétences de ses salariés et permet à ces derniers d’enrichir leur parcours professionnel

 

IV. Les modalités d’exercice du mécénat

A) Le mécénat en « régie directe »

Le mécénat en régie directe s’effectue sans recourir à une structure dédiée. Cette solution offre l’avantage de la simplicité et de l’agilité. Néanmoins, si l’entreprise veut structurer et mieux organiser son mécénat, il est préférable de créer une fondation d’entreprise ou un fond de dotation.

B) L’exercice du mécénat à travers une fondation d’entreprise

Plusieurs facteurs expliquent que les entreprises créent des fondations d’entreprise :

– La nécessité d’organiser l’activité mécénale lorsque celle-ci commence à prendre de l’ampleur

– La nécessité que l’activité mécénale soit gérée avec professionnalisme avec un personnel qui se consacre entièrement à la gestion des dons

– La fondation d’entreprise peut servir de « porte-drapeau » du mécénat de l’entreprise et lui donner une plus grande visibilité

– Afin de crédibiliser la démarche mécénale de l’entreprise

                La fondation d’entreprise peut être créée par des sociétés civiles ou commerciales, des EPIC, des coopératives, des mutuelles ou instituts de prévoyance. Sa constitution nécessite une autorisation préfectorale et de la rédaction de statuts précisant le nom du ou des entreprises fondatrices, son objet, sa durée, l’engagement financier du ou des fondateurs qui doit être d’au moins 150.000€ et les conditions de nomination de son conseil d’administration.

Le financement de la fondation est un financement de flux, elle reçoit chaque année des dotations de son ou de ses fondateurs et les utilisant soit pour financer les actions. La fondation peut aussi recevoir des subventions de l’Etat et des collectivités locales.

C) L’exercice du mécénat à travers un fonds de dotation

La création d’un fonds de dotation répond aux mêmes objectifs que ceux énoncés ci-dessus pour la fondation d’entreprise. Le fonds de dotation se caractérise par une plus grande souplesse que la fondation d’entreprise : il n’est pas soumis à autorisation préfectorale mais à une simple déclaration à la préfecture du lieu de son siège social et peut être d’une durée déterminée ou indéterminée, le ou les fondateurs peuvent librement organiser la gouvernance de cette structure. Par ailleurs, la dotation initiale d’un fonds doit être d’au moins 15.000 € à comparer à la dotation supérieure de la fondation d’entreprise de 150.000 €.

 

V. Les grandes étapes du processus de gestion des dons

A) Les demandes de dons

La fondation ou fonds pourra soit «pro-activement » faire des appels à projet publics ou contacter des organismes d’intérêt général soit « passivement », recevoir des demandes de don.

B) La sélection du bénéficiaire

La sélection des demandes pourra être réalisée, selon la gouvernance de la fondation, par son conseil d’administration et/ou son comité de sélection s’il en existe un, par l’équipe de la fondation ou son dirigeant.

Les critères de sélection sont juridiques et fiscaux : les projets ou actions soutenus doivent s’inscrire dans l’objet de la fondation et doivent servir l’intérêt général. Les projets ou actions pourront être sélectionnés en fonction de l’activité de l’entreprise, de leur visibilité, des expériences et des goûts personnels des sélectionneurs etc…

C) La convention de mécénat et ses clauses principales

La clause d’objet

La clause de financement

La clause de résiliation anticipée

La clause de durée

La clause d’engagements du bénéficiaire

La clause de contreparties

D) La communication

Il existe deux types d’entreprises aux antipodes l’une de l’autre : les non-communicantes qui ne cherchent pas à faire connaître les soutiens qu’elles apportent à leurs causes et les communicantes qui souhaitent faire connaître leur mécénat.

Les modes de communication classique sont : le site de la fondation, son rapport d’activité, ses newsletters… La communication peut aussi être assurée par le bénéficiaire comme contrepartie de l’aide perçue.

E) Le suivi du projet mécéné

L’un des rôles de la fondation est de s’informer et de contrôler la bonne progression du projet ou de l’action qui fait l’objet du soutien de la fondation. Ce suivi pourra être réalisé par l’équipe de la fondation ou par des « parrains » ou « marraines » chargés d’être en contact régulier avec les représentants du bénéficiaire du don.

En cas de non-conformité du déroulement du projet à la convention de mécénat cette dernière pourra, selon les circonstances, faire évoluer la conduite du projet en accord avec le bénéficiaire ou interrompre son soutien financier lorsque l’intégralité du don n’aura pas encore été versé.

F) Le bilan ou évaluation finale

L’évaluation finale du don est essentielle, elle permet à la fondation ou au fonds d’apprécier si son soutien a été utile ou non. Dans certains cas, cette évaluation est difficile voire impossible à réaliser.

Dans tous les cas où elle est possible, l’évaluation qualitative et/ou quantitative paraît néanmoins légitime, pour ne pas dire indispensable : elle renseigne a posteriori la fondation sur la justesse de son choix de mécénat ; elle peut permettre de poursuivre ou au contraire de ne pas renouveler le soutien apporté par la fondation ; en cas de réussite du projet mécéné, elle peut inciter d’autres mécènes à apporter leur soutien.