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Newsletter du cabinet Cazeau & Associés – Février & Mars 2019

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Février – Mars 2019

 

SOMMAIRE

  • ActualitéVotre entreprise a-t-elle une raison d’être ?
  • BrèveContrats de travail internationaux : Coup de sifflet de la Cour de cassation pour les clauses d’élection de for !
  • Articles de presse sélectionnés

 

ACTUALITE

Votre entreprise a-t-elle une raison d’être ?

L’année 2019 sera marquée par une nouvelle réforme d’ampleur dans le domaine économique. Cette réforme portée par le Ministère de l’Economie a été baptisée « Plan d’Action pour la Croissance et la Transformation des entreprises » ou loi PACTE.

Parmi de nombreuses dispositions visant à faciliter et dynamiser la vie des entreprises, figure une innovation notable : celle de « l’entreprise à mission ».

Cette notion vise à opérer un changement de paradigme dans le monde de l’entreprise puisqu’elle ajoute à l’intérêt financier et commercial, un intérêt social.

La loi PACTE qui devrait être adoptée en ce début d’année prévoit une série de dispositions en ce sens qu’il convient d’étudier.

Contexte de la réforme

La Loi PACTE fait partie des grands chantiers initiés par le gouvernement dans le domaine de l’économie. Elle part du constat d’un ressenti négatif des français envers les entreprises. D’une part, les chefs d’entreprises trouvent le système trop lourd et couteux pour pouvoir entreprendre sereinement. D’autre part, les français, en général, ont une certaine méfiance envers les sociétés et leurs intérêts financiers et capitalistiques.

A partir d’études et de rapports, le Ministre de l’Economie Bruno LEMAIRE a soumis au Parlement un projet de loi comprenant de nombreuses dispositions dont l’objectif affiché est de faciliter la vie des entreprises et favoriser croissance et innovation.

Plus particulièrement, s’agissant du sujet qui nous intéresse, le projet de loi PACTE s’inspire en très grande partie des constats et recommandations du rapport de Nicole NOTAT et Jean-Dominique SENARD intitulé « L’entreprise, objet d’intérêt collectif ». Ce rapport évoque justement la nécessité de placer l’intérêt collectif au cœur des entreprises et le besoin de donner corps à la philosophie de l’entreprise à mission.

Pour marquer l’urgence à réformer, le gouvernement a choisi la voie de la procédure parlementaire accélérée qui devrait aboutir à l’adoption du texte en ce début d’année 2019.

Panorama des dispositions de la loi PACTE sur la place des entreprises

Le projet de loi PACTE, en l’état actuel, prévoit plusieurs innovations intéressantes s’agissant de l’intérêt collectif des entreprises.

Ainsi, outre la création de « l’entreprise à mission » qui fait l’objet d’un développement plus long ci-après, le gouvernement propose d’inscrire dans le Code civil et le Code de commerce la notion d’intérêt social des entreprises. Celui-ci recouvre les enjeux sociaux et environnementaux.

Il s’agit d’une notion qui a déjà eu l’occasion d’être abordée dans la jurisprudence notamment dans le cadre de l’abus de confiance ou de l’abus de majorité. Le texte veut imposer une nouvelle philosophie aux entreprises en leur assignant une sorte d’objectif d’intérêt général. Toutefois, les rédacteurs n’ont pas souhaité donner une définition de cet intérêt afin de conserver la flexibilité de la notion.

En complétement, ces dispositions prévoient également que les dirigeants et certains organes des sociétés anonymes comme le conseil d’administration ou le comité de direction prennent en considération les enjeux sociaux et environnementaux avant chacune de leurs décisions.

Pour aller plus loin, le projet propose d’autres innovations comme par exemple la création des « fonds de pérennité ». Il s’agit d’une sorte de fondation destinée à recevoir gratuitement les actions d’une ou plusieurs entreprises dans le but de les allouer à des actions d’intérêt général ou philanthropiques.

Concept et mise en place de l’entreprise à mission

S’agissant plus concrètement de la nouvelle entreprise à mission, le terme recouvre en réalité toutes les sociétés qui auront intégré dans leurs statuts leur « raison d’être , constituée des principes dont la société se dote et pour le respect desquels elle entend affecter des moyens dans la réalisation de son activité ».

En d’autres termes, le gouvernement entend proposer aux entreprises d’intégrer dans leur objet social la recherche d’un intérêt collectif  (la « raison d’être ») accolé à leur intérêt mercantile (la « raison d’avoir »).

De telles sociétés existent déjà dans d’autres pays comme les Etats-Unis, le but étant clairement de redorer l’image que peuvent avoir les sociétés commerciales.

Pour les sociétés déjà existantes, ce changement fera nécessairement l’objet d’une modification de statuts votée à l’occasion d’une assemblée générale extraordinaire entièrement dédiée.

Par ailleurs, les Sociétés Anonymes qui feront le choix de ce modèle devront se doter d’un organe propre qui sera chargé du suivi et de la vérification du respect de la mission nouvellement inscrite dans les statuts.

La création de l’entreprise à mission entrainera plusieurs conséquences, vis-à-vis notamment de la responsabilité des dirigeants.

Toutefois, les rédacteurs du texte ont prévu un garde-fou en écartant toute possibilité de nullités des actes ou délibérations des organes sociaux voire même de la société elle-même en cas d’absence de mention d’intérêts généraux dans les statuts. Il ne s’agit donc que d’une faculté pour les entreprises.

Finalisation et adoption du texte

Le gouvernement a choisi de soumettre l’adoption de son projet de loi PACTE à la procédure parlementaire accélérée. En d’autres termes, le projet ne fait l’objet que d’une seule lecture au Sénat et à l’Assemblée Nationale ; ce qui évite de passer par un processus de navette qui peut parfois s’avérer très long.

A ce stade, le texte a d’ores-et-déjà été étudié par l’Assemblée Nationale et le Sénat. Ce dernier remet d’ailleurs sérieusement en question la notion d’entreprise à mission. Le projet de loi est actuellement entre les mains de la commission mixte paritaire composée de députés et sénateurs. Une nouvelle version plus consensuelle devra donc être soumise au vote des deux chambres dans les prochaines semaines.

 

BRÈVE

Contrats de travail internationaux :
Coup de sifflet de la Cour de cassation pour les clauses d’élection de for !

La Cour de cassation est récemment venue confirmer la compétence des juridictions françaises pour trancher un litige entre un préparateur physique français et son employeur étranger, l’AS Monaco (Cass. Soc., 5 décembre 2018, n°17-19935). Cette décision est intervenue malgré la présence, dans le contrat de travail, d’une clause d’élection de for au profit du juge monégasque.

La Chambre sociale a fondé la compétence des juges français sur le for du lieu de travail habituel du salarié. En effet, elle a validé le raisonnement selon lequel il travaillait habituellement en France.

Cet arrêt est donc l’occasion de faire un rappel sur les règles de conflit de juridictions et plus précisément sur le régime des clauses de prorogation de compétence en matière de contrats de travail internationaux.

D’abord, il convient de rappeler que Monaco, Etat souverain, ne fait pas partie de l’Union Européenne. Il est donc considéré comme un « Etat tiers » au sens du droit européen.

Ensuite, en matière de contrats de travail internationaux, les règles de conflit de juridictions sont contenues, au sein de l’U.E., dans le règlement 1215/2012 du 12 décembre 2012 dit Bruxelles Ibis.

Ce règlement prévoit des règles protectrices des salariés. Ainsi, l’article 23 du règlement n’admet la validité des clauses d’élection de for qu’à condition, soit qu’elles aient été conclues après la naissance du litige, soit qu’elles permettent aux travailleurs de saisir d’autres juridictions que celles compétentes à défaut de choix.

Toutefois, l’arrêt commenté ne statue aucunement sur la validité de la clause, ce qui nous semble regrettable. Il se contente en effet de faire référence à l’article 21§2 du règlement qui prévoit en substance que l’employeur domicilié dans un Etat tiers peut être attrait devant la juridiction européenne du lieu de travail habituel du salarié.

Or, se pose la question de savoir si la règle de conflit de l’article 21§2 est alternative ou supplétive d’une éventuelle clause d’élection de for. Si elle n’est applicable qu’à défaut de prorogation de compétence, il aurait donc fallu en amont se prononcer sur la validité de la clause.

La rédaction du règlement laisse sérieusement penser que c’est la solution de la supplétivité qui serait la seule valable. En effet, l’article 23 indique clairement que la clause d’élection de for « déroge » aux règles prévues par les autres articles.

En l’espèce, il pourra toujours être argué du fait que la clause de prorogation de compétence aurait sans doute été jugée illicite puisqu’elle limitait les options du salarié.

Cependant une question reste en suspens : qu’auraient décidé les juges si la clause en question avait été alléguée par le salarié pour son propre bénéfice ? Par exemple, s’il avait saisi le juge monégasque sur la base de cette prorogation de compétence puis tenter de faire reconnaitre ou appliquer la décision en France ?

Le traditionnel penchant des juges français pour une meilleure protection des salariés aurait peut-être amené la Cour à estimer que cette clause était valide dans de telles circonstances.

Si tel était le cas, se profilerait donc une sorte de règle de conflit de juridictions à géométrie variable, qui contrarierait une certaine logique juridique. Il conviendra donc de se retourner vers la jurisprudence européenne pour trouver une réponse à ce problème.

En conclusion, ce constat met une nouvelle fois en exergue l’importance d’une rédaction adéquate et conforme des clauses d’élection de for. Dès lors qu’ils sont en présence d’un élément d’extranéité, les employeurs doivent être extrêmement vigilants avec ce type de clauses.

 

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