27 rue du Pont Neuf 75001 Paris
+33(0)1 40 20 91 26
info@ncazeau.com

Newsletter du cabinet Cazeau & Associés – Septembre/octobre 2018

Actualisation sur la rupture conventionnelle du contrat de travail

introduction

La rupture conventionnelle d’un contrat de travail à durée indéterminée permet à l’employeur et au salarié d’y mettre fin, dans des conditions fixées d’un commun accord et établies dans une convention homologuée. Si le législateur a consacré au sein des articles L.1237-11 à L. 1237-16 du Code du travail, les textes applicables, son succès grandissant au sein des entreprises, a poussé la chambre sociale de la Cour de Cassation à en préciser les contours. Indemnité spécifique de rupture, délai de rétractation, ou encore annulation de la convention sont autant de points ayant occupé la chambre sociale ces derniers mois.
Indemnité spécifique en cas de rupture conventionnelle
L’employeur et le salarié conviennent ensemble de l’indemnité de rupture conventionnelle.
De manière générale, cette indemnité ne peut être inférieure à l’indemnité légale de licenciement prévue à l’article L. 1234-9 du code du travail. (L.1237-13 C.trav) ou à l’indemnité de licenciement prévue dans la convention collective.
Mais qu’en est-il lorsqu’un salarié peut bénéficier d’une indemnité légale de licenciement plus avantageuse comme l’indemnité des journalistes par exemple (L7112-3 C.trav), dont le mode de calcul est dérogatoire au droit commun ?
En juin 2015 (Cass. soc., 3 juin 2015, n° 13-26.799), la Cour de cassation avait déjà jugé que le minimum de l’indemnité de rupture conventionnelle ne pouvait qu’être calculé selon le mode de calcul de droit commun. L’article L7112-3 qui bénéficie aux journalistes licenciés ne peut donc pas leur être applicable en cas de rupture conventionnelle.
Concernant le bénéfice d’une indemnité conventionnelle plus avantageuse; qu’en est-il lorsque l’employeur n’est pas représenté par un des syndicats signataires de l’avenant n°4 du 11 janvier 2008 de l’ANI ?
L’avenant n°4 du 11 janvier 2008 n’ayant pas été étendu, seuls les salariés des entreprises représentées par les syndicats signataires (Medef, l’UPA ou la CGPME) peuvent bénéficier du plancher prévu par leur convention collective dans la mesure où celui-ci est plus favorable que l’indemnité légale de licenciement.
En conséquence, les salariés qui appartiennent notamment aux secteurs de l’audiovisuel, de l’édition, de la télédiffusion, et du caoutchouc ne peuvent pas, lors de la négociation d’une rupture conventionnelle, imposer à leur employeur le bénéfice de ce plancher minimum prévu dans leur convention collective. L’employeur étant uniquement tenu de verser aux salariés une indemnité de rupture conventionnelle au moins égale à l’indemnité légale de licenciement (Cass. soc., 27 juin 2018, n° 17-15.948).
Face à une telle différence de régime, la Cour de cassation a également renouvelé dans son rapport annuel sa proposition de modifier les dispositions de l’article L.1237-13 du Code du travail afin de prévoir que l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle ne puisse pas être inférieure à l’indemnité conventionnelle de licenciement ou à des dispositions légales plus favorables, indépendamment du secteur d’activité auquel appartient l’entreprise.

Le délai de rétractation en cas de nouvelle convention de rupture remplaçant la première

Une fois la convention de rupture signée, les parties ont 15 jours calendaires pour se rétracter. A la suite de ce délai, l’administration dispose également de 15 jours pour homologuer cette convention de rupture.
Mais qu’en est-il lorsque l’administration refuse d’homologuer la convention de rupture car elle ne respecterait pas certaines dispositions légales, et que les parties établissent alors une seconde convention? Faut-il prévoir un nouveau délai de rétractation de 15 jours ?
Considérant le délai de rétractation comme une garantie essentielle du libre consentement des parties à la rupture du contrat de travail, la Cour de cassation a jugé que « la salariée devait bénéficier d’un nouveau délai de rétractation et que, n’en ayant pas disposé, la seconde convention de rupture était nulle » et cela même si cette dernière était plus avantageuse (Cass. soc., 13 juin 2018, n° 16-24.830). Ainsi dès lors qu’une convention de rupture est modifiée et doit de nouveau être homologuée, il s’agit d’une seconde convention faisant naître un nouveau délai de rétractation.
Les conséquences d’une annulation judiciaire de la rupture conventionnelle
Le salarié dispose de 12 mois pour saisir le juge prud’homal d’une demande en annulation de sa convention de rupture (L.1237-14 C.trav). Cette annulation emporte plusieurs conséquences : la rupture du contrat de travail s’analysera comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et ainsi l’employeur devra verser à l’employé des indemnités de licenciement. Mais qu’advient-il alors des indemnités perçues au titre de la rupture conventionnelle ? Dans un arrêt de mai 2018 (Cass. soc., 30 mai 2018, n° 16-15.273), la cour de cassation a confirmé sa jurisprudence antérieure en jugeant que la nullité de la convention de rupture produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse et emporte ainsi obligation à restitution des sommes perçues en exécution de cette convention.
Il convient donc au salarié de bien évaluer ce qui serait le plus avantageux pour lui, notamment depuis la « barémisation » des indemnités prud’homales: restituer les sommes perçues et se prévaloir de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; ou alors garder les sommes perçues au titre de la convention et renoncer auxdits dommages et intérêts ?