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Le Licenciement en Espagne

Le Licenciement en Espagne

Le licenciement apparaît, en Espagne, comme l’une des dispositions légales permettant de mettre fin à la relation contractuelle liant le salarié et l’entreprise. C’est une modalité de plus parmi les différentes formes de résiliation du contrat de travail prévues par le Statut des travailleurs (ET). Mais, contrairement aux autres formes de résiliation, le licenciement dépend de la volonté de l’employeur. Ainsi, avec l’action en licenciement, l’employeur révoque un salarié qui cessera d’occuper son poste et d’accomplir les tâches dont il avait la charge jusque-là.

Le système juridique espagnol ne permet pas d’accéder à ladite action sans un motif justifié.

Une distinction entre différents types de licenciement s’opère en fonction des causes et conditions ayant mené à ce licenciement. Les différents types de licenciement sont les licenciements objectif, disciplinaire et collectif. Chacun d’entre eux est, à son tour, divisé en trois catégories. On peut dire d’un licenciement qu’il est justifié, injustifié ou nul, selon les circonstances.

Tout d’abord, le licenciement disciplinaire, prévu à l’article 54 du Statut des travailleurs, est fondé sur une faute grave commise par le salarié. Ce type de licenciement est considéré comme la sanction la plus grave dont le salarié puisse faire l’objet. Dans un tel cas, l’employeur est habilité à résilier unilatéralement le contrat.

La classification de ce type de licenciement est de nature disciplinaire. Comme indiqué à l’article 54.1 du Statut des travailleurs, le licenciement disciplinaire doit être fondé sur une “infraction grave et coupable du travailleur“. Le licenciement comme sanction de l’employeur doit être utilisé en dernier recours ; c’est pourquoi le législateur s’efforce d’en limiter l’accès. Les causes pouvant être à l’origine du licenciement disciplinaire sont ainsi énumérées dans le 2ème point de l’article précité :

” a) Absences répétées et injustifiées d’assistance ou de ponctualité au travail,

  1. b) L’indiscipline ou désobéissance au travail.
  2. c) Infractions verbales ou physiques à l’employeur ou aux personnes travaillant dans l’entreprise ou à leurs proches qui vivent avec eux.
  3. d) La transgression de la bonne foi contractuelle, ainsi que l’abus de confiance dans l’exécution du travail.
  4. e) La diminution continue et volontaire du rendement au travail normal ou convenu.
  5. f) L’ivresse ou la toxicomanie habituelles si elles ont un impact négatif sur le travail.
  6. g) Le harcèlement fondé sur la race, l’origine ethnique, la religion ou les convictions, un handicap, l’âge ou l’orientation sexuelle et le harcèlement sexuel ou [le harcèlement] fondé sur le sexe de l’employeur ou des personnes travaillant dans l’entreprise. “

La diversité et la généralité des causes du licenciement disciplinaire rendent cette qualification extrêmement facile pour l’employeur, comme le témoignent divers jugements (TCT 19-25-1981). L’étude détaillée de chaque cas permet de comprendre la portée de cet instrument.

La jurisprudence a clairement indiqué que le licenciement fondé sur des motifs disciplinaires doit être basé sur des actions imputables à l’employé et suffisamment graves. Il doit y avoir dol ou négligence de la part du salarié.

Ensuite, le Licenciement objectif, prévu à l’article 52 du Statut des travailleurs sous le titre “Résiliation du contrat pour raisons objectives”, est aux antipodes du licenciement disciplinaire. Le licenciement objectif permet à l’employeur de se libérer de l’obligation contractuelle vis-à-vis du travailleur lorsque ce dernier cause ou est susceptible de cause un dommage à l’entreprise. De fait, ce type de licenciement doit être motivé et justifié.

Article 52 – Dans le cadre de la résiliation du contrat pour des raisons objectives on considère que “Le contrat peut être résilié :

  1. a) En raison de l’inefficacité connue du travailleur ou survenue après son placement effectif dans l’entreprise. L’inefficacité existant avant la fin d’une période d’essai ne peut être invoquée après ladite période.
  2. b) En raison du manque d’adaptation du travailleur aux modifications techniques apportées à son travail, alors que ces modifications sont raisonnables. […]
  3. c) Lorsque l’une des causes prévues à l’article 51.1 est constatée et que la résiliation concerne un nombre de travailleurs inférieur à celui établi dans le même article. […]
  4. d) Pour les absences d’assistance au travail justifiées mais intermittentes qui atteignent vingt pourcents des jours ouvrables sur deux mois consécutifs à condition que le total des absences au cours des douze mois précédents atteigne cinq pourcents des jours ouvrables, ou vingt-cinq pourcents en quatre mois discontinus sur une période de douze mois. […]
  5. e) Dans le cas de contrats à durée indéterminée, conclus directement par des entités à but non-lucratif pour l’exécution de plans et de programmes publics spécifiques, sans dotation financière stable et financés par les administrations publiques au moyen de crédits budgétaires annuels ou extrabudgétaires résultant de recettes extérieures finalistes, en raison de l’insuffisance du budget ne permettant pas le maintien du contrat de travail en question.

Lorsque le licenciement concerne un nombre de travailleurs supérieur ou égal à celui établi à l’article 51.1, la procédure établie dans ledit article doit être suivie.

L’étendue et la généralité des conditions du licenciement objectif sont une fois de plus très large. Cet outil est, par conséquent, fréquemment utilisé et est à l’origine d’interprétations de toutes sortes. En réalité, il s’agit de l’instrument le plus utilisé au niveau international selon les rapports publiés, de sorte qu’il peut être considéré comme un « fourre-tout » par les départements des ressources humaines.

Enfin, le licenciement collectif (ou ERE (Dossier de régularisation de l’emploi)) est développé à l’article 51 du Statut des travailleurs. Il est compris comme étant la résiliation de contrats de travail fondée sur des considérations économiques, techniques, organisationnelles ou des considérations de production lorsque, dans un délai de quatre-vingt-dix jours, la résiliation affecte au minimum :

“a) Dix travailleurs dans les entreprises de moins de 100 travailleurs,

  1. b) 10% dans les entreprises de 100 à 300 travailleurs, et
  2. c) 30 travailleurs dans les entreprises de plus de 300 travailleurs. “

Ce type de licenciement a connu une forte explosion lors de la crise de 2010 et a été encadré par le Décret royal de mars 2012.

Les causes attribuées à un licenciement collectif dépendent de l’existant ou non d’une cause spécifique prévue par la loi telles que les causes économiques ou techniques, d’organisation ou de production.

  1. a) La cause économique illustre une situation économique défavorable à l’entreprise se traduisant par une perte courante ou prévue, ou impliquant une baisse significative du niveau des revenus ou des ventes. Cependant, il ne suffit pas que ces pertes soient ponctuelles ou saisonnières. Elles doivent être durables et avoir un impact sur l’ensemble de l’entreprise.
  2. b) La cause technique concerne l’organisation interne du travail qui peut être fortement affectée par des changements importants dans les moyens ou les instruments de production.
  3. c) La cause organisationnelle survient lorsqu’il y a des changements importants dans les systèmes ou les méthodes de travail.
  4. d) La cause en lien avec la production représente une situation dans laquelle la demande pour les produits fabriqués ou commercialisés par l’entreprise évolue de manière significative.

Ce type de licenciement est extrêmement complexe, il nécessite une étude détaillée. En effet, une mauvaise délimitation pourrait engendrer la contestation du licenciement. Ainsi, il doit être légalement bien posé.

Chacun des types de licenciement sera ensuite qualifié par le juge. On parlera alors de licenciement justifié, injustifiée ou nul, en fonction des circonstances et du cas d’espèce.

Le licenciement est « justifié » lorsque la preuve de la cause du licenciement du travailleur a été correctement et fidèlement établie.

Le licenciement est « injustifié » (abusif) lorsque le non-respect de la loi par le travailleur n’est pas correctement démontré devant le juge. Il peut également être prononcé en cas de non-respect de certaines exigences formelles établies par la loi.

Le licenciement est déclaré « nul » lorsque le motif du licenciement est lié aux droits fondamentaux inscrits dans la Constitution et dans les lois.

Les conséquences d’un licenciement en termes d’indemnisation, voire de réintégration, dans l’entreprise, du travailleur licencié dépendent de cette qualification. En raison des conséquences qui peuvent en découler pour l’employeur comme pour l’employé, il leur est primordial d’être toujours bien conseillés.

 

Contribution de María Galgau
Abogada – Barreau de Madrid